...
Un fou sur un âne
¶De courroux qui procede de petite cause.
Textes accompagnant une gravure de Dürer dans la Nef des folz du Monde de Sebastian Brant, traduction de 1497
Folio XXIX
¶Qui point son asne sans mesure
Sans fin et tant que cest merueilles
Et le faire courir labeure
Est digne porter grans oreilles
Des indignacions pareilles
Doit auoir lame dispensee
Car brisent vertuz de pensee
¶Ce fol sur lasne paresseux
Monte: se mouue appert diceulx
Au quelz semonnet vne grant ire
Trouble crie de pis en pire
Apres son asne sans auoir ioye
En forme dung chien qui abbaye
¶En sa bouche parle a foison
Mais vng mot ne dit a raison
Ains de son courroux ist fumee
Autant comme de cheminee
Habundamment par le tuau
Ainsi le gecte du museau
Sans mitiguer son mouement
Ne son ire aucunement
Et seiouyt en son cueur maint
Si sa terrible fureur craint
Et son mal le peuple et doubte
Aussi en luy pas ne redoubte
Quil ne soit saige et maintenu
Combien quil soit vng fol tenu
Et que chacun tel le maintient
Que toute folie le tient
Quil est fort foible du cerueau
Plus estourdi que nest vng veau
Pource tout vng chacun leuite
Car il a mauluaitie confite
Et pense quon ne vit iamais
Dautres folz ou fatz que luy. mais
Il couuoite auoir la montre
Des grans oreilles comme vng monstre
¶Saige fuiz cest ire mauldite
De dieu bannie et interdicte
Car elle tue lentendement
Et opprime tout sentement
Et lhomme qui est bien legier
Le rend pesant sans soullager
A quelque aultre bien ou plaisir
Comme sil voult la mort choisir
Nous lisons darchie le saige
Ne de hault noble parentaige
De tarentine la cite
Combien quil fust fort excite
Trouble et son cueur empesche
Pour son seruant quauoit peche
Neautmoins sa grande constance
Refraignit sa malle versance
Contre son serf. ne le pugnit
Ains pardonna sans quil luy fit
Aucun mal ainsi le dit on
¶Semblablement et de platon
De socrates dautres plusieurs
Anciens et antiques aucteurs
Qui leurs mauluaises voluntes
Tournoient et en toutes bontes
Et cest ire la dangereuse
Qui leur estoit trop oultrageuse
Lexpelloient sans nul fiction
Pour ailleur prendre mansion
Hau quil auoient bonne raison
Car celle sans comparaison
Cest qui fait souffrir tant de maulx
De miseres peines et trauaulx
Puis les deux cueurs qui sont amans
Lung contre lautre animans
Droisse pour tous deux les destruyre
De biens ou de corps qui est pire
Le sens macule naturel
O peche tu es trop cruel
Toutesfois pour le mouement
Dire lhomme dentendement
Sembride et se prent par la reine
Et se garde bien quil ne regne
Et ceulx cy sont saiges de fait
Car ire ne les contrefait
Par quelque douleur dens leur cueur
Et si leur vient quelque maleur
Ou quelque passion dolente
Leur vouloir trop ne se guemente
Ains le portent et sont pacifiques
Garniz de vertuz deificques
Qui les conduira a lempire
Et ces ireux auront le pire
Qui ont la volunte si fiere
Et ne refrenent en maniere
Leur ire ains par tout deslie
Son mauluais vouloir et folie
Du quel pour son oultrecuydance
Son enfer au monde commence
Et actend venir son maleur
¶Le saige est pacient en cueur
Qui par sa saigesse et prudence
Prent tout le mal en pacience
Et refraint son malin couraige
Et garde quil ne soit volaige
¶O continuez vous prudens
Eslisez asnes bien allans
Et legiers sur lesquelz montez
Affin que mieulx vous les domptez
Et voz folz bestes paresseuses
Qui daller sont trop plus que oyseuses
Lesquelles vous feront ire et peine
Et en fin meschance greuaine
Textes accompagnant une gravure de Dürer dans la Nef des folz du Monde de Sebastian Brant, traduction de 1497
Folio XXIX
¶Qui point son asne sans mesure
Sans fin et tant que cest merueilles
Et le faire courir labeure
Est digne porter grans oreilles
Des indignacions pareilles
Doit auoir lame dispensee
Car brisent vertuz de pensee
¶Ce fol sur lasne paresseux
Monte: se mouue appert diceulx
Au quelz semonnet vne grant ire
Trouble crie de pis en pire
Apres son asne sans auoir ioye
En forme dung chien qui abbaye
¶En sa bouche parle a foison
Mais vng mot ne dit a raison
Ains de son courroux ist fumee
Autant comme de cheminee
Habundamment par le tuau
Ainsi le gecte du museau
Sans mitiguer son mouement
Ne son ire aucunement
Et seiouyt en son cueur maint
Si sa terrible fureur craint
Et son mal le peuple et doubte
Aussi en luy pas ne redoubte
Quil ne soit saige et maintenu
Combien quil soit vng fol tenu
Et que chacun tel le maintient
Que toute folie le tient
Quil est fort foible du cerueau
Plus estourdi que nest vng veau
Pource tout vng chacun leuite
Car il a mauluaitie confite
Et pense quon ne vit iamais
Dautres folz ou fatz que luy. mais
Il couuoite auoir la montre
Des grans oreilles comme vng monstre
¶Saige fuiz cest ire mauldite
De dieu bannie et interdicte
Car elle tue lentendement
Et opprime tout sentement
Et lhomme qui est bien legier
Le rend pesant sans soullager
A quelque aultre bien ou plaisir
Comme sil voult la mort choisir
Nous lisons darchie le saige
Ne de hault noble parentaige
De tarentine la cite
Combien quil fust fort excite
Trouble et son cueur empesche
Pour son seruant quauoit peche
Neautmoins sa grande constance
Refraignit sa malle versance
Contre son serf. ne le pugnit
Ains pardonna sans quil luy fit
Aucun mal ainsi le dit on
¶Semblablement et de platon
De socrates dautres plusieurs
Anciens et antiques aucteurs
Qui leurs mauluaises voluntes
Tournoient et en toutes bontes
Et cest ire la dangereuse
Qui leur estoit trop oultrageuse
Lexpelloient sans nul fiction
Pour ailleur prendre mansion
Hau quil auoient bonne raison
Car celle sans comparaison
Cest qui fait souffrir tant de maulx
De miseres peines et trauaulx
Puis les deux cueurs qui sont amans
Lung contre lautre animans
Droisse pour tous deux les destruyre
De biens ou de corps qui est pire
Le sens macule naturel
O peche tu es trop cruel
Toutesfois pour le mouement
Dire lhomme dentendement
Sembride et se prent par la reine
Et se garde bien quil ne regne
Et ceulx cy sont saiges de fait
Car ire ne les contrefait
Par quelque douleur dens leur cueur
Et si leur vient quelque maleur
Ou quelque passion dolente
Leur vouloir trop ne se guemente
Ains le portent et sont pacifiques
Garniz de vertuz deificques
Qui les conduira a lempire
Et ces ireux auront le pire
Qui ont la volunte si fiere
Et ne refrenent en maniere
Leur ire ains par tout deslie
Son mauluais vouloir et folie
Du quel pour son oultrecuydance
Son enfer au monde commence
Et actend venir son maleur
¶Le saige est pacient en cueur
Qui par sa saigesse et prudence
Prent tout le mal en pacience
Et refraint son malin couraige
Et garde quil ne soit volaige
¶O continuez vous prudens
Eslisez asnes bien allans
Et legiers sur lesquelz montez
Affin que mieulx vous les domptez
Et voz folz bestes paresseuses
Qui daller sont trop plus que oyseuses
Lesquelles vous feront ire et peine
Et en fin meschance greuaine